Pour devenir un acteur accompli, il est souvent nécessaire de savoir ce qui a fait de notre discipline ce qu’elle est aujourd’hui. Pour les futures comédiens et comédiennes, le théâtre, dont on retrouve les premières formes dès l’Antiquité, est une mine d’inspiration. Et pour que vous ne passiez pas pour un inculte, on vous résume dans cette rubrique, Une petite histoire du théâtre, les principaux auteurs et courants théâtraux de chaque époque. Cap sur le XVIIIe siècle et les Lumières !

Le XVIIIe siècle : à grand bouleversements, grands divertissements 

Le théâtre des Lumières voit le jour en plein mouvement de contestation. A la mort de Louis XIV en 1715, les restrictions et l’austérité religieuse qu’il avait imposé à la fin de son règne cessent. Le peuple à soif de divertissement et le théâtre de foire explose. Le vent contestataire qui monte peu à peu dans la deuxième partie du siècle contribue à attiser le refus des règles et des cadres. On relègue au placard le théâtre classique et ses conventions très strictes. La tragédie est délaissée car le public se désintéresse des intrigues lourdes et mythologiques. Dans ce contexte tendu, deux genres émergent et viennent dominer le théâtre du XVIIIe siècle : le drame bourgeois et la comédie de mœurs. 

Le drame bourgeois

Le drame bourgeois apparaît au début du courant des Lumières, pour disparaître avec la fin du XVIIIe siècle. Se refusant de la rigueur des règles de la tragédie et de la caricature dessinée par la comédie, il propose un intermédiaire entre les deux. Mettant en scène des personnages bourgeois, ses pièces à la tonalité dramatique, sont tournées vers des problèmes sociétaux et familiaux plus actuels que les malheurs des grands héros antiques. Pour autant, ce courant théâtral affectionne l’exagération et les intrigues romanesques.

Le naturel devient plus important que la vraisemblance, et cette exigence met l’accent sur les acteurs. Sous l’impulsion de Diderot, les premières théories sur le jeu des comédiens sont écrites. L’écrivain prône les vertus de la pantomime pour porter les grands moments d’émotions plutôt qu’avoir recours à la parole par des textes lyriques. 

Dans la forme, c’est en partie au drame bourgeois qu’on doit la séparation entre la scène et le public. Au milieu du siècle, grâce à certaines créations de Voltaire, on supprime les bancs situés directement sur le plateau et on encadre la scène avec des rideaux. C’est l’âge d’or du théâtre à l’italienne. Les décors s’organisent pour donner l’illusion de perspective, avec des peintures en trompe l’œil en fond de scène et un plateau légèrement incliné. 

 

La comédie de moeurs

La comédie de mœurs est le genre à la mode et celui qui va dominer tout le siècle. Si elle se réclame de Molière, elle aborde des thèmes différents, principalement orientés vers la critique sociétale. Il est indéniable que son objectif est contestataire et que sous couvert du rire, elle contribue à faire naître ou à attiser les idées révolutionnaires.

Pour ce qui est de ses caractéristiques, la comédie de mœurs se reconnaît principalement par sa tonalité satirique. La satire utilise la moquerie et la caricature pour critiquer un individu ou un groupe d’individus. Il n’est pas difficile en se penchant sur les pièces présentant la vie de maîtres et des valets à leur service, de s’imaginer ce que la comédie de mœurs cherche à faire ressortir.  Les procédés communs à la satire sont l’exagération ou la diminution d’un fait, d’une personne ou d’un objet dans le but de ridiculiser, la parodie, et la juxtaposition de deux choses d’importances différentes en soutenant qu’elles ont pourtant la même importance. 

 

Les dramaturges incontournables de cette époque

Denis Diderot, théoricien du drame bourgeois, s’impose en chef de file de ce courant théâtral. Il écrit deux essais : Paradoxe sur le comédien et De la poésie dramatique. Avec ses pièces, Le Fils Naturel et Le Père de Famille, il tente d’imposer sa vision d’un nouveau théâtre. 

Quant à Marivaux et Beaumarchais, ils sont sans conteste les deux nouvelles figures théâtrales de ce nouveau siècle. 

Le premier domine la première moitié du siècle avec un théâtre qui parle du sentiment amoureux, avec des intrigues psychologiques. Le langage amoureux qu’il utilise, plus subtil et raffiné, donne dès son vivant lieu à l’expression “marivauder”. Si Marivaux laisse derrière lui deux drames bourgeois (La mère confidente et La femme fidèle), il est surtout reconnu pour ses comédies. On notera parmi elle Le Jeu de l’Amour et du Hasard et La Double Inconstance.

Beaumarchais vient conquérir la seconde partie du siècle, en s’essayant au drame bourgeois avant de triompher avec ses comédies de mœurs. Son utilisation piquante du registre satirique ponctue la trilogie qui a fait son succès : Le Mariage de Figaro, Le Barbier de Séville et L’Autre Tartuffe ou la Mère Coupable. En y mettant en scène le valet Figaro et ses idées révolutionnaires, il prône l’avènement de la bourgeoisie et le triomphe des valets. 

Il est impossible de clôturer ce chapitre sur le théâtre du XVIIIe siècle sans parler des tragédies de Voltaire, qui s’épanouissent telles des réminiscences du classicisme du siècle précédent. Il garde la structure classique et les alexandrins mais explore des sujets plus modernes allant de la moralisation des mœurs, au républicanisme et au refus du fanatisme religieux. A son époque, il règne en maître sur la Comédie-Française pour laquelle il rédige plus de 30 pièces, dont Œdipe, Mahomet, et Zaïre, ses plus grands succès.