A vos carnets et vos stylos, un nouvel épisode d’Une Petite Histoire du Théâtre vous attend ! Pour devenir un acteur accompli, il est souvent nécessaire de savoir ce qui a fait de notre discipline ce qu’elle est aujourd’hui. Pour les futures comédiens et comédiennes, le théâtre, dont on retrouve les premières formes dès l’Antiquité, est une mine d’inspiration. Et pour que vous ne passiez pas pour un inculte, on vous résume dans cette rubrique, les principaux auteurs et courants théâtraux de chaque époque. Après avoir parcouru le théâtre de la première partie du XIXe siècle, intéressons-nous à la deuxième partie du siècle. Si le vaudeville y a toujours un place prédominante, d’autres mouvements ont fait leur apparition …

 

Le XIXe siècle : 

Le théâtre naturaliste

Les origines

Au milieu du 19e siècle, l’essor de l’industrialisation et les conditions de ses travailleurs mettent en lumière les problématiques sociales. La psychologie devient par ailleurs un sujet à la mode, et nombre de théoriciens, comme Sigmund Freud, avancent les résultats de leurs études sur la psyché humaine. Les auteurs, eux, se saisissent de leur plume pour critiquer la réalité et les injustices qui les entourent, en la décrivant de la manière la plus objective et crue possible. Emile Zola, éminent journaliste est l’exemple le plus frappant quand il s’agit d’illustrer le mouvement naturaliste dont il est le chef de file.

Au théâtre, André Antoine, en créant le Théâtre Libre, donne au naturalisme un lieu d’expérimentation. Ses théories sur la mise en scène déplacent le metteur en scène de technicien à créateur, et donnent naissance à notre conception moderne de ce rôle.  Le naturel du jeu est travaillé avec soin : les personnages doivent être réalistes dans leur gestuelle et leur parler. Les sujets sont à la fois quotidien, proposant au spectateur d’assister à une tranche de vie, mais contiennent toujours dans le fond une réflexion sur une problématique sociétale. Les décors sont également modestes, représentant une cuisine, ou une usine. L’ère industrielle et l’arrivée du gaz et de l’électricité permettent la création d’éclairages, qui viennent appuyer le réalisme des décors.

Les dramaturges incontournables

Si l’on connaît surtout Emile Zola pour sa série littéraire des Rougon-Macquart, il a aussi écrit des pièces de théâtre et se pose comme créateur du mouvement naturaliste. Il est donc important de lire Thérèse Raquin ou encore Madeleine, même si son succès au théâtre fut bien moindre que celui de ses romans.

Octave Mirbeau et Henry Becque font parti des dramaturges naturalistes les plus remarqués. Le premier cherche à travers ses pièces à faire ressortir une vérité sociale avec notamment Les Corbeaux et La Parisienne. Mirbeau, lui, anarchiste, offre au public avec sa première pièce, Les Mauvais Bergers, le récit de l’éclosion d’une grève ouvrière et de son écrasement dans le sang. Elle est représentée au théâtre de la Renaissance en 1897, avec Sarah Bernhard et Lucien Guitry. On notera également son œuvre Le Foyer, histoire d’un foyer d’accueil chrétien pour jeunes adolescentes qui devient au fil des scandales un lieu exploitant le travail de ces jeunes filles.

 

Le théâtre symboliste

Les origines

Totalement à l’opposé du courant naturaliste, le symbolisme refuse lui tout réalisme et cherche à exprimer les tréfonds de l’âme humaine et des vérités métaphysiques universelles.

Le décor n’est presque pas présent. On notera l’utilisation régulière de rideau de gaze permettant de dissimuler les acteurs et les toiles de fond souvent peintes par des peintres symbolistes tel que Toulouse-Lautrec. Les personnages sont peu identifiables et les acteurs les jouent avec une lenteur exagéré et une quasi immobilité. Le texte prend alors toute la place sur scène grâce à ce cadre spatio-temporel volontairement flou.

Proche de la poésie, les drames du théâtre symboliste sont complexes et très intellectuels. Le langage est recherché et précieux, les sujets sont métaphysiques. Le style somme toute pompeux de ce théâtre ne survivra cependant pas à l’arrivée du nouveau siècle et le mouvement s’essoufle rapidement.

Les dramaturges incontournables

Le dramaturge symbolique le plus connu sera sans contexte Maurice Maeterlinck. Dans ses pièces, il développe trois thématiques : le drame statique (personnages immobiles, passifs et réceptifs à l’inconnu) ; le personnage sublime (assimilé souvent à la mort, il représente la Destinée ou la Fatalité) ; et le tragique quotidien (pas d’héroïsme, le simple fait de vivre est tragique).   Il décrit ses personnages comme « des somnambules un peu sourds constamment arrachés à un songe pénible ». Sa pièce la plus emblématique est Pelléas et Mélisande, qu’il créé en 1892 où il propose un univers imaginaire et angoissant. La réécriture de cette légende du Moyen-Age propose un drame intemporel : celui d’une histoire d’amour et de jalousie. 

Le véritable précurseur du théâtre symboliste, cependant, est Villiers de l’Isle-Adam, qui n’aura de cesse de rejeter les conventions dramatiques jusque là en place. Interessé par l’occultisme et sans conteste idéaliste, ses oeuvres dont le thème récurrent est le rêve sont empreintes d’une touche de noirceur qu’il emprunte à son modèle, Edgar Allan Poe. Axël, publié de manière posthume en 1890, est considéré par beaucoup comme un manifeste du théâtre symboliste. Mais La Révolte, publié en 1870, près de 20 ans auparavant, annonçait déjà l’identité littéraire du poète et dramaturge, résolument moderne et inconventionnel.

 

 

Vous aurez bien compris que la seconde partie du XIXe siècle oscille dans tout le milieu artistique entre symbolisme et naturalisme, et le théâtre ne fait pas exception. Refermons la page des années 1800, au combien foisonnantes pour le théâtre, et retrouvons nous bientôt pour découvrir l’évolution des courants théâtraux au siècle suivant !